Le Patois du Girmont Val d'Ajol

Présentation

Créé par Jean Marie Manens et moi-même, le groupe de patoisants est né fin 1999, il a pour nom " Lâ Patoisant dâ trô R'vère" (Les Patoisants des Trois Rivières) car les villes du Girmont Val d'Ajol, Plombières les Bains et Le Val d'Ajol se sont unies sous le nom de "communauté de communes des Trois Rivières", et les patoisants qui se réunissent régulièrement sont essentiellement originaires de ces trois communes.

Depuis, un membre originaire de Xertigny (Gilbert Duchêne) a créé un groupe de patoisants à Xertigny et le groupe s'est structuré :

 

Ancien tract électoral en patois

(vers 1900)

Elections au Conseil d’arrondissement

 

DIALOGUE ENTRE DEUX CULTIVATEURS

DU CANTON DE PLOMBIERES

 

Jean. — Je vié d’éouo in cô de chépé jusqu'é tarre, te ne devinerô jémâ de qui?

Coliche. — So ctépoi de Mossieu lo Curé ?

Jean. — Ah ouaye, Mossieu lo Curé o in brôvôme què no dit tojo bonjour ; ma laut-citte so in mossieu que ne revoide jémâ lâ jo de campêne. Y o tu ?

Coliche. — Nian.

Jean. — Hé bié so Parisot, lo banquié de Piomère, te ne I’éro jémâ possé; j'â tu bien ébôbi et j’mâ demandè quo ce que ce ieu dire.

Coliche. — Ah j’y seuye, nieu das élections dieumoinche, è se présote pou lo conseil d’errondissemo pou rèpiécè Camille Guerre, cè ieu dire : votez pour moi, é peu to salut te pieu lo motte è té pouche è to moucheuye dessu, èpré dieumoinche te non nairé pâ pu quévant.

Jean. — Quo ce que ton dit ?

Coliche. — Ce no mi su què no fo ; nieu Vial, lo maire de Ruaux, que fero bié meu not’éfare, so ûne dà nôt, so c’mo Camille Guerre, in lébourou que c'no su quê no fô, que je pouro pôlé so no gêné, patois, franço, mo que no vouro ; è leu tu cassè ène fouo do to do Buffet, c'mo Thomas, de Reméremont, éco Arnould, do Jeurmont, mâ lo sous-préfet eu biè vu que lé commune de Ruaux ne poyait son pessé et fe bié vite renommè, so-t-ène preuve que lo capable. No ne poyo meu fâre que de votè pou lu, lé commune de Ruaux o bié gouvernaye, elle fâ sè petite effare et so lè seule do canton que n'è poi de dottes, è fereu lè mâme chose au conseil d’errondissemo.

Je n’c’no mi Parisot, je n'sè mi si è lo bié capable, on n’lon jémâ vu do rié ; là jo de Piomére dejo que quand on li pôle d’effare, è pesse so doye dezo so nè et peu è fâ : psitt.

Jean. — Portant lazômes reuches c’mo lu devo ét’ instru, è on sévouo pu que nozôte.

Coliche. — J’te di su q’on mon di, j’non sè mi dévotège, mâ lâ Piémère devo bié lo c’noche.

Jean. — N’ote mi do conseil?

Coliche. — O ! ô ! Mâ. E leu manqué de non mi éte, è ne fe nomè que lo derraye eco è nô q’ène voix de rechte.

Jean. — Eloco suppléant do juge de paix ?

Coliche. — Je n’lâ jémâ vu è l’audience, è peu j’mâ leyeu dire què ne cnochait mi granchose azeffâre de proço.

Jean.. — E tié co lè banque, è gaigne to pien d’orgent ?

Coliche. — O! ô mâ so pou lu ; te sèré que lâ banquiers ne feyo mi leffâre dâ jo de campène, è lon da comptes ou ce què on n’y fou gotte; nieu ché Parisot in commis que épri lè banque è Rméremont et que vo fâ jolimo lâ comptes, è sont jeutes, mâ no ne sérin la compenre : seulemo quand no refayo lû comptes, è not'manière, no trouvo que l’orgent de lè banque no cote bié pu chié que sute dâ particuliers. Lâzômes lè sont trop reuches, è fayo trop bié lâ comptes pou no, è no fo âque de pu simple.

E peu se no mi to Parisot o de lè bonde de sôte que vourin rémoinè in ro, Henri cinq, vou je n’sè qui ; te compro que so dâzôme dongeroux pou no, è pourrin in bé jo, si Claude ou Claudot venin è meuri, votè pou in hôme de lut’bord, et si bécô fayin diné è no réouocherin Mac-Mahon evo lè République, è peu è no ferin lè Révolution : no n'évo mi couéru lè République, mâ no l'évo, è fo lè ouedjè, pu qon chenge, moi que sè vô, so tojo lo paysan que paye.

Parisot premot to pien, è lon premot jè tro, è ne poureu mi teni, è peu è nété jè mi si quémérade évo Camille Guerre, quétait totéfa pou lé République : le père Camille, si è poyait r’veni, en’vouro poi dâ complimo de Parisot.

Tié, cromeu, layo lazéfan éco là bouêne fôme de moteye fàre évo Parisot, è no mi mo què d’jo è lé ville, un candidat sérieux, vota tortu dieumoinche pou Vial que fâ sâ preuves.

 

Elections au conseil d'arrondissement

DIALOGUE ENTRE DEUX CULTIVATEURS

DU CANTON DE PLOMBIERES

 

Jean : Je viens d'avoir un coup de chapeau jusqu'à terre, tu ne devineras jamais de qui ?

Coliche : C'est peut-être monsieur le curé ?

Jean : Ah oui, Monsieur le curé est un brave homme qui nous dit toujours bonjour ; mais l'autre-ci c'est un monsieur qui ne regarde jamais les gens de la campagne. Entends-tu ?

Coliche : Non.

Jean : Eh bien c'est Parisot, le banquier de Plombières, tu ne l'aurais jamais pensé ; j'ai été bien surpris et je me suis demandé ce que cela voulait dire.

Coliche : Ah j'y suis, il y a des élections dimanche, il se présente pour le conseil d'arrondissement pour remplacer Camille Guerre, cela veut dire : Votez pour moi, et puis ton salut tu peux te le mettre dans la poche et ton mouchoir par-dessus, après dimanche tu n'en auras pas plus qu'avant.

Jean : Qu'en dis-tu ?

Coliche : Ce n'est pas celui qu'il nous faut ; il y a Vial, le maire de Ruaux, qui ferait bien mieux notre affaire, c'est un des nôtres, c'est comme Camille Guerre, un laboureur qui nous connaît qu'il nous faut, avec qui je pourrai parler sans me gêner, patois, français, comme nous voulons ; il a été cassé une fois du temps de Buffet, comme Thomas de Remiremont, encore Arnould du Girmont, mais le sous préfet a bien vu que la commune de Ruaux ne pouvait s'en passer et fut bien vite renommé, c'est une preuve qu'il est capable. Nous ne pouvons mieux faire que de voter pour lui, la commune de Ruaux est bien gouvernée, il fait ses petites affaires et c'est le seul du canton qui n'aie pas de dettes, il fera la même chose pour le conseil d'arrondissement. Je ne connais pas Parisot, je ne sais pas si il est bien capable, on ne l'a jamais vu dans rien ; les gens de Plombières disent que quand on lui parle d'affaires, il passe son doigt sous son nez et puis il fait : Psitt.

Jean : Pourtant les hommes riches comme lui doivent être instruits, et en savoir plus que nous autres.

Coliche : Je te dis ce que l'on m'a dit, je n'en sais pas davantage, mais les Plombinois doivent bien le connaître.

Jean : Il n'est pas du conseil ?

Coliche : O ! ô ! Mais il a manqué de pas y être, il ne fût nommé que le dernier et avec une voix de rachetée.

Jean : Il est encore suppléant du juge de paix ?

Coliche : Je ne l'ai jamais vu à l'audience, et puis je me suis laissé dire qu'il ne connaissait pas grand-chose aux affaires de procès.

Jean : Il tient encore la banque, il gagne tout plein d'argent ?

Coliche : O ! ô ! mais c'est pour lui ; tu sauras que les banquiers ne feront jamais les affaires des gens de la campagne, ils ont des comptes et l'on n'y comprend rien ; il y a chez Parisot un commis qui a appris la banque à Remiremont et qui vous fait joliment les comptes, ils sont justes, mais on ne saurait les comprendre : seulement quand nous refaisons les comptes à notre manière, nous trouvons que l'argent de la banque nous coûte bien plus cher que celui des particuliers. Les hommes là sont trop riches, ils font trop bien les comptes pour nous, il nous faut quelqu'un de plus simple.

Et puis ce n'est pas ton Parisot ou de la bande de sottes que voudraient ramener un Roi, Henri V ou je ne sais qui ; tu comprends que ce sont des hommes dangereux pour nous, ils pourraient bien un jour, si Claude ou Claudot venaient à mourir, voter pour un homme de leur bord, et si beaucoup faisaient comme ça, ils nous renverseraient Mac Mahon avec la république, et puis il nous ferait la révolution : nous n'avons pas cherché la révolution, mais nous l'avons, il faut la garder, plus que l'on change, moins que cela vaut, c'est toujours le paysan qui paye.

Parisot promet beaucoup, il en promet déjà trop, il ne pourra pas tenir, et puis il n'était pas si camarade avec Camille Guerre, qui était tout à fait pour la république : le pauvre Camille si il pouvait revenir, il n'en voudrait pas des compliments de Parisot.

Tiens, crois-moi, laissons les enfants et les bonnes femmes de l'église faire avec Parisot, il n'est pas, comme disent les gens de la ville, un candidat sérieux, votons tous dimanche pour Vial qui a fait ses preuves.

 

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